Un automne à la poursuite des aurores boréales
Partie début novembre pour la Finlande avec un groupe de voyageurs, Edwige Caron, conceptrice de voyages polaires, a tenu un carnet de bord de son voyage. Sur les traces des aurores boréales, elle a découvert un pays où la nature est reine.
1er novembre 2022, nous décollons de Paris-Charles-de-Gaulle vers Ivalo, petit aéroport situé à 150 km au nord du cercle polaire. Il est 18h, le soleil vient de se coucher et la nuit polaire enveloppe doucement ciel et terre. Le froid tombe, il neigeote dehors.
Durant le vol, le visage collé au hublot, je guette la moindre lumière dans ce noir profond, dans l'espoir de les apercevoir. Elles devraient être là, quelque part, ces lumières de l'Arctique : les aurores boréales. Mes efforts sont enfin récompensés, elles apparaissent, au bout de l'aile de l'avion, dansantes et envoûtantes ! Quelques instants plus tard nous arrivons à Ivalo. À notre surprise, tout est blanc. Il fait -10°C. Il a neigé quelques centimètres la veille. L'hiver semble bien installé.
Le sauna attendra
Le programme de la semaine sera bien chargé entre découverte des parcs nationaux, chasse aux aurores boréales et sauna finlandais quotidien. Sur les bords du lac Inari, l'été fait de la résistance aux assauts de l'hiver. C'est l'endroit idéal pour la photographie.
Loin du village du Père Noël, les paysages sont sublimes dans cette région encore plutôt préservée du tourisme.
Ici, on peut comprendre l'histoire du peuple Sami, ces éleveurs de rennes nomades emblématiques de la Laponie (Norvège, Suède, Finlande et Russie). Nous rendons visite à un couple de mushers installé dans la région avec leurs 34 chiens de traineau. Ils nous font découvrir leur camp, leur mode de vie au plus près de la nature et leurs chiens.
Plus tard nous descendons vers Saariselkä où nous retrouvons notre guide Stéphane pour quelques jours. Guide polaire spécialiste de la Laponie, la région n'a plus aucun secret pour lui. Photographe de talent, il nous donne des conseils sur le cadrage, le réglage et la mise au point pour réussir une photo. Passionné par les aurores boréales, il part en chasse dès qu'il reçoit une notification d'activité lumineuse sur son smartphone. Les aurores n'attendent pas, il faut toujours être prêt à partir dans les cinq minutes qui suivent. Le sauna, lui, peut attendre. Voyager en Laponie n'apporte pas l'assurance absolue de voir les aurores. Elles restent un phénomène naturel.
Danse magique
Notre grand chalet est situé sur les hauteurs de Saariselkä, une petite station de ski au climat montagnard. Sur les tunturis (petite colline typique de la Laponie), la neige fraichement tombée et le froid mordant ont figé la végétation. Les bruits sont étouffés et seul le bruissement de nos pas vient perturber le silence. En journée, nous progressons jusqu'à des cabanes dans lesquelles Stéphane nous prépare des déjeuners autour du feu. Randonner dans cette région sans un guide expérimenté n'aurait pas la même saveur.
A la tombée du jour, le sauna chaud nous attend au chalet avant de partir à la chasse aux aurores.
Un soir où ne nous les attendions pas, elles se sont présentées. L'activité solaire était quasi nulle mais une petite éruption imprévue a fait mentir la science. Le temps de s'habiller et de charger le véhicule, elles étaient au-dessus de nous, visibles depuis le chalet. Un moment magique, un ballet enchanteur. Ce soir-là, personne n'a sorti son appareil photo et nous avons tous profité de cet instant unique. Lors de ces apparitions, j'ai le sentiment qu'elles viennent nous transmettre un message. Leur apparence mystique impose le respect et l'humilité.
A l'état brut
Le lendemain, au moment du dîner, nouvelle notification. Après deux-trois appels, Stéphane sait où aller pour avoir le meilleur point de vue car il y a du brouillard là où nous sommes. Le dessert attendra. Après 30 minutes de route, Stéphane s'arrête et éteint les phares. Nous sortons les trépieds et préparons le matériel dans l'espoir qu'elles apparaissent. Nous ne nous ferons pas prier trop longtemps. Les voilà, encore une fois. Rivés sur nos appareils, nous profitons des conseils de Stéphane pour repartir avec nos propres clichés.
Brusquement, la météo change. Comme partout, le réchauffement climatique s'initie sournoisement. En une nuit la pluie vient gâcher la fête. Nous quittons Saariselkä pour rejoindre Kiilopaa, un petit resort de montagne plus au sud. Il abrite l'un des plus vieux saunas au bois de la région dans lequel les locaux viennent se retrouver en fin de journée. Dans cette ambiance très scandinave, les Finlandais sont intrigués par notre curiosité et s'amusent de nous voir entrer dans l'eau pour ressortir aussi vite... Question d'habitude !
Déjà, il est l'heure de rentrer en France. Sur la route qui nous mène à l'aéroport, les rennes traversent sans méfiance. La Laponie en automne, c'est avant tout un moment hors du temps. On y réapprend à vivre simplement, loin de nos vies au rythme effréné, au cœur d'une nature à l'état brut.
